Le roi Marc a la preuve que Tristan et Iseut le trahissent sont amants . Il arrête les deux amants, refuse le duel judiciaire que demande Tristan et il les conduit au bûcher pour les brûler.
Tristan réussit à s'échapper et il se cache à l'extérieur de la ville avec son fidèle Gorvenal. Iseut, toujours prisonnière, doit être brûlée vive. brûlée vivante
Iseut se tient debout devant la flamme. Autour d'elle, la foule crie, maudit le roi, maudit les traîtres. Les larmes coulent le long de son visage. Un fil d'or est tressé dans ses cheveux, qui tombent jusqu'à ses pieds. Qui pourrait la voir si belle sans la prendre en pitié aurait un coeur de félon. Dieu ! comme ses bras sont étroitement liés ! fortement attachés
Or, cent lépreux,
La lèpre est une maladie qui attaque la peau déformés, la chair rongée et toute blanchâtre, accourus sur leurs béquilles au claquement des crécelles
les lépreux se déplaçaient en faisant du bruit avec leur crécelle pour que les gens soient prévenus, se pressaient devant le bûcher, et, sous leurs paupières enflées, leurs yeux sanglants jouissaient du spectacle.
Deux lépreux moyenâgeux agitant une crécelle (ou cliquette), portant bâton et écuelle.
(extrait d’un manuscrit français, 15e s., B.N.F Paris)
Yvain, le plus hideux des malades, cria au roi d'une voix aiguë :
« Sire, tu veux jeter ta femme en ce brasier, ce feu, ce bûcher c'est une bonne justice mais la punition est trop brève. courte, rapide Ce grand feu l'aura vite brûlée, ce grand vent aura vite dispersé sa cendre. Et, quand cette flamme tombera tout à l'heure, sa peine sa souffrance sera finie. Veux-tu que je t'enseigne un châtiment une punition pire: qu'elle vive, mais en espérant la mort ? Roi, le veux-tu ? »
Le roi répondit :
« Oui, la vie pour elle, mais pire que la mort… Je remercie celui qui m'enseignera un tel supplice. une souffrance si terrible.
–Sire, je te dirai donc brièvement rapidement ma pensée. Regarde: j'ai là cent compagnons. Donne-nous Iseut, et qu'elle nous soit commune ! qu'elle soit notre femme à tous. Le mal attise augmente, excite nos désirs. Donne Iseut à tes lépreux, jamais dame n'aura une pire vie que la sienne. Vois, nos haillons nos vêtements déchirés, abîmés sont collés à nos plaies qui suintent. coulent Elle qui, près de toi, se plaisait aux riches étoffes tissus de qualité , aux joyaux, aux bijoux, aux pierres précieuses , elle qui jouissait des bons vins, de l'honneur, de la joie, quand elle verra la cour de tes lépreux, quand il lui faudra entrer sous nos taudis bas nos petites habitations très pauvres et coucher avec nous, alors Iseut la Belle, la Blonde, reconnaîtra son péché et regrettera ce beau feu d'épines ! »
Le roi l'entend, se lève et reste longuement immobile. Enfin, il court vers la reine et la saisit prend fortement par la main. Elle crie :
«Par pitié, sire, brûlez-moi plutôt, brûlez-moi ! »
Le roi la livre. donne aux lépreux Yvain la prend et les cent malades se pressent autour d'elle. En les entendant crier et glapir, tous les témoins ont pitié de la reine ; mais Yvain est joyeux ; Iseut s'en va, Yvain l'emmène. Le hideux cortège de lépreux sort de la cité.
Ils ont pris la route où Tristan est embusqué. caché Gorvenal jette un cri :
« Tristan, que feras-tu ? Voici ton amie ! »
Tristan pousse son cheval hors du fourré : buisson
« Yvain! crie Tristan. Tu lui as assez longtemps tenu compagnie ; laisse-la maintenant, si tu veux vivre ! »
Mais Yvain dégrafe son manteau.
« Hardi, courage compagnons ! À vos bâtons ! À vos béquilles ! C'est l'instant de montrer sa prouesse son courage, sa valeur, son habileté !»
Alors les lépreux rejetèrent leurs manteaux, se campèrent se dressèrent (se camper= se tenir droit) sur leurs pieds malades, soufflèrent, crièrent, brandirent leurs béquilles : l'un menace et l'autre grogne.
Mais Tristan ne voulait pas les frapper ; les conteurs prétendent que Tristan tua Yvain : c'est dire vilenie mensonge, mauvaise parole ; non, il était trop preux valeureux, il avait trop de qualités, d'honneur pour occire tuer des gens comme eux. Mais Gorvenal, ayant arraché un jeune tronc de chêne, il l'assena sur le crâne d'Yvain ; le sang noir jaillit et coula jusqu'à ses pieds difformes.
Tristan reprit la reine. Il trancha les cordes de ses bras, et, quittant la plaine, ils
s'enfoncèrent dans la forêt du Morois. Là, dans les grands bois, Tristan se sent en sûreté comme derrière la muraille d'un fort château.
Quand le soleil se coucha, ils s'arrêtèrent au pied d'un mont ; la peur avait fatigué la reine ; elle reposa sa tête sur le corps de Tristan et s'endormit.
Au matin, Gorvenal déroba vola à un forestier son arc et deux flèches et les donna à Tristan. Celui-ci surprit un chevreuil et le tua. Gorvenal fit un tas de branches sèches et alluma un grand feu pour cuire la bête ; Tristan coupa des branchages, construisit une hutte
et la recouvrit de feuillée ; Iseut la joncha couvrit le sol d'herbes épaisses.
Alors, au fond de la forêt sauvage, commença pour les fugitifs les fuyards une vie dure.