Avant notre départ, Circé m'appelle et me dit:
"Ulysse, ton retour vers Ithaque est plein de danger.
Tu vas passer près des sirènes puis tu devras naviguer entre les terribles Charybde et Scylla.
D'un côté, tu auras un énorme rocher pointu et lisse: aucun homme ne peut l'escalader. Au milieu de ce rocher, il y a une sombre cavernegrotte où vit la redoutabledangereuse Scylla : c'est un monstre affreux à la voix de chienne. Elle a douze petits pieds et six cous géants avec six têtes effroyables ! Chaque gueule a trois rangées de dents terribles. Scylla se cache dans sa caverne et surgit quand un navire passe: elle sort ses cous et chaque gueule dévore un marin. Aucun bateau n'a réussi à passer sans morts."
Circé continue: "De l'autre côté, il y a un autre rocher, plus petit. Un grand figuier pousse. Au pied de ce rocher vit Charybde : trois fois par jour elle engouffreavale la mer et trois fois par jour elle vomit l'eau. Ne passe pas près de Charybde pendant qu'elle avale la mer! Personne ne pourrait te sauver. Même Zeus ne pourrait rien faire pour t'aider!
Il vaut mieux passer près de Scylla que de Charybde. Il vaut mieux perdre six marins que couler le navire et mourir tous ensemble."
Je demande à Circé: "Mais, si j'attaquais Scylla?
— Scylla ne peut pas mourir, me répond la magicienne. C'est un monstre inattaquable ! La seule solution est de se sauver, de passer le plus rapidement possible."
Je reviens au navire et j'explique tout à mes compagnons. Nous partons. Nous traversons le territoire des sirènes puis nous arrivons près de chez Charybde et Scylla.
Au loin, nous apercevons d'énormes vagues et nous entendons un bruit terrible. Mes compagnons sont effrayésont très peur et lâchent leurs rames. Le bateau n'avance plus.
Je me lève pour encourager mes compagnons: "Mes amis, nous avons déjà connu de nombreux dangers. Souvenez-vous du terrible Cyclope qui nous a enfermés dans sa grotte ! Il était puissant, violent. Mais nous avons réussi à nous sauver. Comment ? Grâce à mon intelligence et à ma ruse. Faites-moi confiance encore une fois. Ecoutez bien ce que je vais dire et obéissez-moi. Vous, les rameurs, frappez la mer en enfonçant vos rames sous les vagues et ramez de toutes vos forces."
Je me tourne vers l'homme qui tient la barre du navire et je lui dis: "Toi, le pilote, voici mes ordres: tu vois au loin ce jaillissement d'embruns et ces vagues ? Ne t'approche pas de là sinon nous mourrons tous! Dirige le bateau vers l'autre rocher! N'oublie pas!"
Je ne parle pas à mes compagnons de la terrible Scylla car j'ai peur que les rameurs abandonnent leurs rames pour se cacher au fond du navire. Mais je n'écoute pas les conseils de Circé: je prépare mes armes contre Scylla. Je prends deux longues lances et je vais me placer à l'avant du bateau. J'observe l'immense rocher et j'attends de voir Scylla. Mais je ne vois rien et mes yeux se fatiguent.
Nous passons, angoissés , entre les deux rochers, entre Charybde et Scylla. Quand Charybde vomit, toute l'eau bouillonne et , dans un bruit terrible, une énorme vague s'écrase contre les deux rochers. Quand elle avale l'eau, un tourbillon se forme : nous apercevons le fond de la mer et nous entendons un mugissement effrayant. Mes compagnons sont terrorisés.
Pendant que nous regardons Charybde, Scylla sort ses têtes de sa caverne et enlève six de mes hommes. Je les entends hurler. Je tourne la tête et j'aperçois leurs bras et leurs jambes qui s'agitent; ils crient mon nom. Scylla les dévore: je vois encore leurs mains bouger. Jamais je n'ai vu une telle horreur!
Nous passons enfin les deux écueils et nous arrivons près de l'île du Soleil.