Les figures de style

La comparaison

I.La comparaison en image


"La terre est bleue comme une orange", Paul Eluard


II. La comparaison à l'écrit

"Il faut avoir assisté à un incendie dans les pampas de l'Amérique du Sud pour se faire une idée de la splendide horreur d'un tel spectacle. Des forêts vierges brûlent tout entières, et leurs arbres séculaires se tordent avec des râles d'agonie, des frémissements et des tressaillements de douleur, poussant comme des créatures humaines des plaintes et des cris ; les montagnes incandescentes ressemblent à des phares lugubres et sinistres, dont les immenses nappes de flammes montent en tournoyant vers le ciels, qu'elles colorent au loin de reflets sanglants."

Gustave Aimard, Oeuvres


D’autres petites flammes frémirent autour d’un tronc d’arbre et rampèrent à travers les broussailles en se multipliant. L’une d’elles prit un fût d’assaut et grimpa au sommet comme un écureuil chatoyant. Comme un jaguar qui rampe vers sa proie, les flammes rampaient vers une rangée de jeunes bouleaux.

Sa Majesté des Mouches de W.Golding

La métaphore

I. La métaphore dans l'image

      



Frida Kahlo, "La colonne brisée", 1944


II. La métaphore dans la description

Quand une métaphore dure longtemps dans un texte, on appelle cela une métaphore filée. Dans le texte suivant, les flammes sont comparées à un écureuil et à un jaguar : la comparaison devient métaphore filée et personnification.

De la fumée rampait çà et là parmi les lianes qui ourlaient les arbres morts. Soudain, une langue de feu doubla une traînée de fumée et celle-ci devint plus épaisse. D’autres petites flammes frémirent autour d’un tronc d’arbre et rampèrent à travers les broussailles en se multipliant. L’une d’elles prit un fût d’assaut et grimpa au sommet comme un écureuil chatoyant. La fumée augmentait, s’effilochait, s’éloignait par ondes. L’écureuil bondit sur les ailes du vent et s’accrocha à un autre fût demeuré debout qu’il dévora en descendant vers les racines. Sous le dais obscur de feuilles et de fumée, les flammes prirent possession de la forêt et se mirent à la ronger. De vastes nappes de fumée noire et jaune se déplaçaient régulièrement vers l’Océan. [...] Comme un jaguar qui rampe vers sa proie, les flammes rampaient vers une rangée de jeunes bouleaux qui garnissaient une crête de roche rose. Elles se jetèrent sur le premier arbre et les branches se garnirent d’un éphémère feuillage de feu. La masse des flammes franchit d’un bond souple l’espace entre les arbres, puis se déchaîna tout le long de la rangée. En dessous des garçons qui gambadaient, trois cents mètres carrés de forêt croulaient sous la furie des flammes et de la fumée. Les craquements se succédaient en un roulement de tambour qui semblait ébranler toute la montagne.

Sa Majesté des Mouches de W.Golding

III. La métaphore en poésie

Mélancholia

Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ?
Ces doux êtres pensifs, que la fièvre maigrit ?
Ces filles de huit ans qu'on voit cheminer seules ?
Ils s'en vont travailler quinze heures sous des meules ;
Ils vont, de l'aube au soir, faire éternellement
Dans la même prison le même mouvement.
Accroupis sous les dents d'une machine sombre,
Monstre hideux qui mâche on ne sait quoi dans l'ombre,
Innocents dans un bagne, anges dans un enfer,

Ils travaillent. Tout est d'airain, tout est de fer.
Jamais on ne s'arrête et jamais on ne joue.
Aussi quelle pâleur ! la cendre est sur leur joue.
Il fait à peine jour, ils sont déjà bien las.
Ils ne comprennent rien à leur destin, hélas !
Ils semblent dire à Dieu : « Petits comme nous sommes,
« Notre père, voyez ce que nous font les hommes ! »
Ô servitude infâme imposée à l'enfant !
Rachitisme ! travail dont le souffle étouffant
Défait ce qu'a fait Dieu ; qui tue, œuvre insensée,
La beauté sur les fronts, dans les cœurs la pensée,
Et qui ferait — c'est là son fruit le plus certain —
D'Apollon un bossu, de Voltaire un crétin !
Travail mauvais qui prend l'âge tendre en sa serre,
Qui produit la richesse en créant la misère,
Qui se sert d'un enfant ainsi que d'un outil !

"Melancholia" de Victor Hugo, 1838, Les Contemplations


Entre métaphore et personnification

   




Exemple de texte mêlant comparaison , métaphore ou métaphore filée et personnification

De la fumée rampait çà et là parmi les lianes qui ourlaient les arbres morts. Soudain, une langue de feu doubla une traînée de fumée et celle-ci devint plus épaisse. D’autres petites flammes frémirent autour d’un tronc d’arbre et rampèrent à travers les broussailles en se multipliant. L’une d’elles prit un fût d’assaut et grimpa au sommet comme un écureuil chatoyant. La fumée augmentait, s’effilochait, s’éloignait par ondes. L’écureuil bondit sur les ailes du vent et s’accrocha à un autre fût demeuré debout qu’il dévora en descendant vers les racines. Sous le dais obscur de feuilles et de fumée, les flammes prirent possession de la forêt et se mirent à la ronger. De vastes nappes de fumée noire et jaune se déplaçaient régulièrement vers l’Océan. [...] Comme un jaguar qui rampe vers sa proie, les flammes rampaient vers une rangée de jeunes bouleaux qui garnissaient une crête de roche rose. Elles se jetèrent sur le premier arbre et les branches se garnirent d’un éphémère feuillage de feu. La masse des flammes franchit d’un bond souple l’espace entre les arbres, puis se déchaîna tout le long de la rangée. En dessous des garçons qui gambadaient, trois cents mètres carrés de forêt croulaient sous la furie des flammes et de la fumée. Les craquements se succédaient en un roulement de tambour qui semblait ébranler toute la montagne.

Sa Majesté des Mouches de W.Golding



La personnification

I. La personnification dans l'image


Franquin, "Idées noires", 1986


Illustration par Brandville (XIX°s) des fables de La Fontaine: "le Loup et le Chien" et "Le chêne et le roseau"
      



Autres exemples de personnifications: au cinéma et dans les affiches de communication
      


II. La personnification dans la description

"Il faut avoir assisté à un incendie dans les pampas de l'Amérique du Sud pour se faire une idée de la splendide horreur d'un tel spectacle. Des forêts vierges brûlent tout entières, et leurs arbres séculaires se tordent avec des râles d'agonie, des frémissements et des tressaillements de douleur, poussant comme des créatures humaines des plaintes et des cris." (Gustave Aimard, Oeuvres)


De la fumée rampait çà et là parmi les lianes qui ourlaient les arbres morts. Soudain, une langue de feu doubla une traînée de fumée et celle-ci devint plus épaisse. D’autres petites flammes frémirent autour d’un tronc d’arbre et rampèrent à travers les broussailles en se multipliant. L’une d’elles prit un fût d’assaut et grimpa au sommet comme un écureuil chatoyant. La fumée augmentait, s’effilochait, s’éloignait par ondes. L’écureuil bondit sur les ailes du vent et s’accrocha à un autre fût demeuré debout qu’il dévora en descendant vers les racines. Sous le dais obscur de feuilles et de fumée, les flammes prirent possession de la forêt et se mirent à la ronger. De vastes nappes de fumée noire et jaune se déplaçaient régulièrement vers l’Océan. [...] Comme un jaguar qui rampe vers sa proie, les flammes rampaient vers une rangée de jeunes bouleaux qui garnissaient une crête de roche rose. Elles se jetèrent sur le premier arbre et les branches se garnirent d’un éphémère feuillage de feu. La masse des flammes franchit d’un bond souple l’espace entre les arbres, puis se déchaîna tout le long de la rangée. En dessous des garçons qui gambadaient, trois cents mètres carrés de forêt croulaient sous la furie des flammes et de la fumée. Les craquements se succédaient en un roulement de tambour qui semblait ébranler toute la montagne.

Sa Majesté des Mouches de W.Golding


L'allégorie

I. L'allégorie en peinture


"La grande faucheuse", tableau de Nikolai A.Tarkhov



Allégorie de l'égalité


"La liberté guidant le peuple" de Eugène Delacroix,


II. L'allégorie en poésie

Mélancholia

Cette fille au doux front a cru peut-être, un jour,
Avoir droit au bonheur, à la joie, à l'amour.
Mais elle est seule, elle est sans parents, pauvre fille !
Seule ! — n'importe ! elle a du courage, une aiguille,
Elle travaille, et peut gagner dans son réduit,
En travaillant le jour, en travaillant la nuit,
Un peu de pain, un gîte, une jupe de toile.
[...]
Mais l'hiver vient. Il fait bien froid, en vérité,
Dans ce logis mal clos tout en haut de la rampe ;
Les jours sont courts, il faut allumer une lampe ;
L'huile est chère, le bois est cher, le pain est cher.
Ô jeunesse ! printemps ! aube ! en proie à l'hiver !
La faim passe bientôt sa griffe sous la porte,
Décroche un vieux manteau, saisit la montre, emporte
Les meubles, prend enfin quelque humble bague d'or ;

Tout est vendu ! L'enfant travaille et lutte encor ;

"Melancholia" de Victor Hugo, 1838, Les Contemplations


France, mère affligée…


"La République nourrit ses enfants et les instruit"
d'Honoré Daumier, 1848

Je veux peindre la France une mère affligée,
Qui est, entre ses bras, de deux enfants chargée.

Le plus fort, orgueilleux, empoigne les deux bouts
Des tétins nourriciers ; puis, à force de coups
D'ongles, de poings, de pieds, il brise le partage
Dont nature donnait à son besson l'usage ;
Ce voleur acharné, cet Esau malheureux,
Fait dégât du doux lait qui doit nourrir les deux,
Si que, pour arracher à son frère la vie,
Il méprise la sienne et n'en a plus d'envie.
Mais son Jacob, pressé d'avoir jeûné meshui,
Ayant dompté longtemps en son cœur son ennui,
A la fin se défend, et sa juste colère
Rend à l'autre un combat dont le champ est la mère.
Ni les soupirs ardents, les pitoyables cris,
Ni les pleurs réchauffés ne calment leurs esprits ;
Mais leur rage les guide et leur poison les trouble,
Si bien que leur courroux par leurs coups se redouble.
Leur conflit se rallume et fait si furieux
Que d'un gauche malheur ils se crèvent les yeux.
Cette femme éplorée, en sa douleur plus forte,
Succombe à la douleur, mi-vivante, mi-morte ;
Elle voit
les mutins, tout déchirés, sanglants,
Qui, ainsi que du cœur, des mains se vont cherchant.
Quand, pressant à son sein d'une amour maternelle
Celui qui a le droit et la juste querelle,
Elle veut le sauver, l'autre, qui n'est pas las,
Viole en poursuivant, l'asile de ses bras.
Adonc se perd le lait, le suc de sa poitrine ;
Puis, aux derniers abois de sa proche ruine,
Elle dit : " Vous avez, félons, ensanglanté
Le sein qui vous nourrit et qui vous a porté ;
Or, vivez de venin, sanglante géniture,
Je n'ai plus que du sang pour votre nourriture ! "

"France, mère affligée..." d'Agrippa d'Aubigné, Les Tragiques, 1616


Mors


Serre, Savoir vivre

Je vis cette faucheuse. Elle était dans son champ.
Elle allait à grands pas moissonnant et fauchant,
Noir squelette laissant passer le crépuscule.

Dans l'ombre où l'on dirait que tout tremble et recule,
L'homme suivait des yeux les lueurs de la faulx.
Et les triomphateurs sous les arcs triomphaux
Tombaient ; elle changeait en désert Babylone,
Le trône en échafaud et l'échafaud en trône,
Les roses en fumier, les enfants en oiseaux,
L'or en cendre, et les yeux des mères en ruisseaux.

Et les femmes criaient : - Rends-nous ce petit être.
Pour le faire mourir, pourquoi l'avoir fait naître ? -
Ce n'était qu'un sanglot sur terre, en haut, en bas ;
Des mains aux doigts osseux sortaient des noirs grabats ;
Un vent froid bruissait dans les linceuls sans nombre ;
Les peuples éperdus semblaient sous la faulx sombre
Un troupeau frissonnant qui dans l'ombre s'enfuit ;
Tout était sous ses pieds deuil, épouvante et nuit.
Derrière elle, le front baigné de douces flammes,
Un ange souriant portait la gerbe d'âmes.

"Mors" de Victor Hugo, Les Contemplations



L'oxymore ou "oxymoron"

I. Exemples

"Il faut avoir assisté à un incendie dans les pampas de l'Amérique du Sud pour se faire une idée de la splendide horreur d'un tel spectacle." (Gustave Aimard, Oeuvres)

          



II. Exemples d'oxymores dans les titres d'articles de presse

III. L'oxymore en image

   

Une antiphrase