Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;
J'ai chaud extrême en endurantsouffrant de froidure :
La vie m'est et trop molle et trop dure.
J'ai grands ennuistristesse profonde entremêlés de joie.
Tout à un coupSoudain je ris et je larmoie,
Et en plaisir maint griefgrave tourment j'endure ;
Mon bien s'en va, et à jamais il dure ;
Tout en un coupEn même temps je sèche et je verdoie.
Ainsi Amour inconstamment me mène ;
Et, quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouve hors de peine.
Puis, quand je crois ma joie être certaine,
Et être au haut de mon désiré heurbonheur,
Il me remet en mon premier malheur.
"Je vis, je meurs...", Sonnets, 1555, Louise Labé
Poétesse lyonnaise du XVI° siècle (1524-1566).
Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ; Tout à un coup je ris et je larmoie, Ainsi Amour inconstamment me mène ; Puis, quand je crois ma joie être certaine, |
Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ; Tout à un coup je ris et je larmoie, Ainsi Amour inconstamment me mène ; Puis, quand je crois ma joie être certaine, |
Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;
J'ai chaud extrême en endurant froidure :
La vie m'est et trop molle et trop dure.
J'ai grands ennuis entremêlés de joie.
Tout à un coup je ris et je larmoie,
Et en plaisir maint grief tourment j'endure ;
Mon bien s'en va, et à jamais il dure ;
Tout en un coup je sèche et je verdoie.
Ainsi Amour inconstamment me mène ;
Et, quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouve hors de peine.
Puis, quand je crois ma joie être certaine,
Et être au haut de mon désiré heur,
Il me remet en mon premier malheur.